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Conseils pour votre quotidien d'entrepreneur

Page mise à jour le 18/12/2017

Partager un salarié avec une autre entreprise

Les petites entreprises doivent, à effectif constant, absorber une charge de travail qui est fluctuante selon le carnet de commande. Ne pouvant embaucher à chaque pic d’activité, certaines se tournent vers le partage de collaborateurs : une pratique facilitée par les plateformes en ligne, mais strictement encadrée par la loi.

Le « prêt de main d'œuvre » d'un employeur à un autre est autorisé sous certaines conditions, mais il est très encadré.
© Shutterstock

Pourquoi partager des salariés ?

Votre comptable n’est pas pleinement occupé toute l’année ? Vous pouvez le mettre à disposition d'une autre PME ou d'un cabinet d'expertise comptable. Vous avez besoin d’une expertise pour mener à bien un projet particulier, mais de façon ponctuelle ? Pourquoi ne pas emprunter la compétence à l’entreprise qui la détient ? Vous bénéficiez des services d’un secrétaire ou d’une hôtesse d’accueil ? Vous pourriez les mettre en commun avec l’entreprise qui partage votre immeuble.

Dans chacune de ces situations, le partage de salariés - ou « prêt de main d'œuvre », que propose des sites comme masolutionemploi.com ou mobiliwork, peut vous intéresser. Ces sites mettent en relation des entreprises qui souhaitent prêter ou emprunter du temps de collaborateurs, pour une semaine ou plusieurs mois, dans un cadre juridique sécurisé. Ils fournissent en général toute la documentation utile - convention de mise à disposition et avenant au droit du travail - pour sécuriser ces démarches.

Prêt de main d’œuvre ou partage de salarié ?

Partager des salariés est possible dans le cadre de groupements d'employeurs. Dans le cas du prêt de main d'œuvre, un employeur prête un salarié à un autre employeur. Dans le cas du groupement d'employeurs, l'employeur est le groupement lui-même.

Un groupement d'employeur regroupe plusieurs employeurs d'un même bassin d'emploi et a pour mission de recruter des salariés et de les mettre à la disposition exclusive de leurs adhérents. Ces structures ont été mises en place par la loi du 25 juillet 1985 pour légaliser des pratiques courantes dans le milieu agricole.

Les entreprises adhérant au GE partagent un personnel dans la durée, payent une cotisation annuelle et signent avec le GE une convention de mise à disposition de main d'œuvre salariée.

Chaque salarié du GE est embauché par un employeur unique - le GE -, qui assume toutes les formalités administratives liées au contrat de travail.

Différents types de GE sont aujourd'hui possibles, en plus des GE agricoles et ruraux : des GE classiques ou GE à vocation économique non agricoles - qui rassemblent des entreprises ou personnes morales ou physiques du même secteur d'activité ou de secteurs différents -, les GE pour l'insertion et la qualification (GEIQ) qui agissent en faveur de l'insertion des personnes en marge du marché du travail, et les GE associatifs du monde sportif ou culturel.

Prêter ou emprunter des salariés : les avantages

Emprunter des salariés à d'autres entreprises est avantageux dans les cas de figure suivants :

  • votre entreprise opère dans un secteur « en tension » et rencontre des difficultés à recruter certains profils ;
  • votre chiffre d'affaires est fluctuant, vous manquez de visibilité et vous hésitez à embaucher un nouveau salarié ;
  • vous souhaitez profiter des talents et de l'expérience de collaborateurs déjà en poste - une PME peut ainsi bénéficier de l'expertise d'un salarié d'un grand groupe - ;
  • vous faites face à une commande à caractère exceptionnel et vous n'avez pas le personnel nécessaire ou les compétences dans vos équipes ;
  • vous souhaitez accéder à une expertise temporaire en économisant les coûts liés à l'intervention d'un intermédiaire ;
  • vous êtes intéressés par une solution rapide et simple, sans autre formalité qu'une facture émise par la société prêteuse.

« Prêter » vos salariés est intéressant si :

  • vous faites face à une baisse d'activité ou si l'un de vos collaborateurs se trouve momentanément disponible ;
  • vous ne souhaitez pas recourir au chômage partiel ou procéder à un licenciement économique ;
  • vous souhaitez conserver des compétences précieuses pour le développement de votre entreprise ;
  • vous désirez offrir à vos salariés une forme de mobilité dans un cadre sécurisé.

Dans quels cas le prêt de main d'œuvre est-il légal ?

L’ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail encadre le recours au prêt de main d’œuvre à but non lucratif.

Une entreprise peut mettre à disposition de manière temporaire ses salariés auprès d’une jeune, d’une petite ou moyenne entreprise, afin de lui permettre d’améliorer la qualification de sa main d’œuvre, de favoriser les transitions professionnelles ou de constituer un partenariat d’affaires ou d’intérêt commun. Le dispositif est applicable :

  • aux jeunes entreprises « utilisatrices » qui ont moins de 8 ans d’existence au moment de la mise à disposition et aux entreprises d’au maximum 250 salariés
  • aux groupes ou entreprises « prêteuses » qui ont moins de 5 000 salariés

La mise à disposition d’un salarié ne peut être effectuée au sein d’un même groupe et ne peut excéder une durée de 2 ans. Les opérations de prêt de main d’œuvre n’ont pas de but lucratif même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire.

Le prêt à but lucratif n'est autorisé que pour les agences d'intérim, le portage salarial ou les agences de mannequin.

L'accord du salarié obligatoire

Impossible de prêter un salarié sans son accord. Celui-ci doit  signer un avenant à son contrat de travail indiquant :

  • les tâches qu'il va devoir accomplir dans l'entreprise où il est missionné ;
  • les horaires et le lieu de travail ;
  • les caractéristiques de son poste de travail.

Le salarié a toute liberté de refuser cette proposition et ne peut être sanctionné pour cela.

À l'issue de cette mission, il retrouve son poste d'origine.

Son évolution au sein de votre entreprise ou sa rémunération ne doivent pas s'en trouver affectées.

Une convention à rédiger entre les deux parties

Depuis la loi Cherpion, du 28 juillet 2011, l'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice doivent obligatoirement signer une convention de mise à disposition du salarié, précisant :

  • l'identité et la qualification du salarié ;
  • la durée de sa mise à disposition ;
  • les salaires, charges sociales et frais professionnels facturés à l'entreprise utilisatrice ;
  • éventuellement la période probatoire au cours de laquelle l'une des deux parties peut mettre fin à cette mise à disposition du salarié - lorsque le prêt de main d'œuvre modifie un élément essentiel du contrat de travail, par exemple les horaires ou les missions du salarié, cette période probatoire est obligatoire -.

Si vous prêtez plusieurs salariés, vous devez signer une convention pour chaque salarié prêté.

Les instances à prévenir

Avant tout détachement d'un salarié, il est nécessaire de consulter le comité d'entreprise, le CHSCT ou les délégués du personnel et de les informer des conventions à signer.

Quelles sont les conséquences du prêt du salarié sur le contrat de travail ?

Le salarié détaché continue à appartenir à votre entreprise et à bénéficier de l'ensemble de ses droits et obligations, comme s'il travaillait toujours au sein de votre entreprise.

Son contrat de travail n'est ni rompu, ni suspendu : il est toujours effectif.

L'entreprise d'origine reste en effet l'employeur du salarié. À ce titre, elle continue d'établir son bulletin de paie, de lui régler son salaire et de cotiser auprès des différentes caisses, etc.

La responsabilité de l'entreprise d'accueil vis à vis du salarié détaché

Durant la période de mise à disposition du salarié, l'entreprise d'accueil est responsable des conditions d'exécution du travail pour tous les sujets portant sur la durée du travail, le travail de nuit, les repos hebdomadaire et jours fériés, les congés payés, l'hygiène et la sécurité, l'égalité femmes-hommes et la réglementation relative aux jeunes travailleurs. Par ailleurs, la responsabilité de l'entreprise d'accueil peut être engagée en cas de faute inexcusable si celle-ci a commis de graves négligences ayant entraîné un accident du travail ou une maladie professionnelle pour le salarié détaché.

Prêt illicite de salariés : des sanctions lourdes

Tout prêt illicite vous expose à des sanctions pénales lourdes, pouvant aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende - 150 000 euros pour une personne morale -, que vous soyez prêteur ou emprunteur du salarié.

Vous vous exposez également à d'autres peines complémentaires, comme l'interdiction d'exercer certaines activités professionnelles, l'exclusion des marchés publics durant cinq ans maximum, la publication dans les  journaux du jugement, la suppression des aides publiques, ou la fermeture de votre entreprise.

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Protection juridique MMA

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En cas de litige entre le salarié et l’entreprise d’accueil, l’option protection juridique(1) de la multirisque pro de l’entreprise prêteuse peut être actionnée pour :

  • obtenir de l’information juridique délivrée par des juristes experts en droit du travail,
  • tenter de résoudre les conflits à l’amiable,
  • accompagner l’entreprise dans ses démarches judiciaires.

Parlez-en à votre Agent Général MMA !

(1) Assurée et gérée par COVEA Protection juridique.

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