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Page mise à jour le 12/07/2023

Sécurité sur un chantier : prévenir la faute inexcusable de l’employeur

Le secteur du BTP enregistre chaque année un nombre important d'accidents du travail et de maladies professionnelles (AT/MP). En tant qu’employeur, comment se prémunir contre des conséquences juridiques et financières de plus en plus lourdes ? Éléments de réponse.

L’obligation de sécurité sur un chantier est assimilée à une obligation de résultat par la Cour de cassation.
© Moodboard/Thinkstock

Au sommaire

Le cadre juridique de la faute inexcusable de l’employeur

En tant qu’employeur, vous avez une obligation de sécurité envers vos collaborateurs. Il vous incombe donc de mener les actions de prévention, de formation et d’information à leur attention. C’est notamment pour cette raison qu’il est demandé aux employeurs de produire un document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP). Obligatoire dès l’embauche de votre premier salarié, le DUERP permet d'évaluer les risques pour la santé et la sécurité de vos salariés. 

En cas de manquement constaté après un accident du travail ou une maladie professionnelle, le principe de la faute inexcusable de l’employeur pourrait être invoqué contre vous si le salarié victime montre que vous aviez conscience du danger et que vous n'aviez pas pris les dispositions requises pour le protéger. Vous, ou vos subordonnés, pouvez alors être condamné à : 

  • Rembourser aux organismes sociaux (comme la Sécurité sociale) les indemnités ayant été versées au salarié ;
  • Rembourser les indemnités supplémentaires accordées aux victimes (majoration de rente et les préjudices personnels) au titre des dommages et intérêts.

Les personnes se trouvant dans l’une des situations suivantes ne sont, en revanche, pas tenues d’apporter de preuve de la faute :

  • Les salariés en CDD, les stagiaires et les intérimaires qui n’ont pas réalisé de stage de formation à la sécurité ;
  • Si un salarié ou le comité social et économique de l’entreprise avait déjà signalé un risque.

L’obligation de sécurité et de protection de la santé 

Depuis 2002, la Cour de cassation assimile l’obligation de sécurité à une obligation de résultat, on parle désormais « d’obligation de sécurité de résultat » dès lors qu’un contrat de travail est signé. De même, après le rendu de quatre arrêts le 8 octobre 2020, la deuxième chambre civile insiste encore davantage sur cette notion d'obligation légale de sécurité, en la couplant avec l’obligation légale de protection de la santé. 

Par conséquent, la responsabilité de l’employeur est engagée de plein droit du seul fait de l’inexécution de son obligation de sécurité et de protection de la santé. D’un point de vue pratique, cela vous oblige, en tant qu’employeur à tout mettre en œuvre pour éviter les accidents ou maladies professionnelles.

Si vous ne pouvez pas échapper aux poursuites en tant qu’employeur, leurs conséquences seront considérablement amoindries si vous pouvez prouver : 

  1. Que vous avez pris toutes les précautions nécessaires à la sécurité des salariés, c’est-à-dire concrètement :
    - Avoir mis en place des programmes de formation ;
    - Avoir diffusé une information en matière de prévention ;
    - Avoir affiché les consignes et des avertissements spécifiques visibles par tous les salariés ;
    - Avoir mis en place un système de contrôle du respect des consignes
    (la signature des employés prouve qu’ils ont été informés) ;
  2. Que vous n’avez aucune responsabilité dans la survenance de l’accident ;
  3. Que vous avez pris toutes les mesures de sécurité et de protection ;
  4. Ou encore que cet accident est le fait d’une cause étrangère (un cas de force majeure, comme une rafale de vent soudaine et non prévue par les services météo). 

Comment se prémunir contre les conséquences de la faute inexcusable ?

En cas d’accident ou de maladie professionnelle, un employeur doit démontrer qu’il a communiqué précisément auprès de ses salariés sur les risques qu’ils encourent, préconisé des mesures adaptées pour y faire face et pris les mesures de prévention et de protection qui s’imposent.

Si vous travaillez avec d’autres entrepreneurs, vous devez réaliser un plan de prévention des risques communs pour :

  • Déterminer les mesures d’information et de formation des salariés ;
  • Formaliser les délégations de pouvoir et répartir  très précisément le rôle et les responsabilités de chaque intervenant.

Votre responsabilité peut, d’autre part, être engagée non seulement en raison de votre propre faute inexcusable, mais également du fait de celle des personnes à qui vous avez délégué des responsabilités (article L. 452-1 du code de la Sécurité sociale). En pratique, cela signifie que vous pourrez être tenu responsable de fautes commises par les cadres, les chefs d'équipe ou les chefs de chantier de votre entreprise.

En tant que chef d’entreprise vous devrez, en outre, être en mesure de prouver :

  • Que vous avez mis en place une organisation et des moyens adaptés, et que vous avez formalisé une démarche pour imposer le port d’équipements de protection individuelle (EPI) ;
  • Que vous exercez un suivi de santé de vos collaborateurs en veillant, tout au long de l'exécution des contrats de travail, à la prise en compte et à l'adaptation des mesures mises en place, et en organisant la traçabilité des actions.

Souscrire une assurance spécifique ?

Les actions devant les tribunaux en reconnaissance de faute inexcusable ont augmenté. Être bien assuré est plus que jamais essentiel pour faire face à ces situations.

Une garantie faute inexcusable de l’employeur, non obligatoire, peut-être inclue dans votre contrat d'assurance Responsabilité civile professionnelle. L'étendue, le montant ou les franchises de la garantie peuvent varier d'un assureur à l'autre.

En cas d’accident, que faire ?

En cas d’accident, la meilleure garantie pour l’employeur est : 

  • De réaliser en amont les démarches d’information de formation, de suivi sanitaire des salariés ; 
  • De prendre toutes les mesures de prévention et de sécurité qui s'imposent ; 
  • D’être en mesure d’en apporter les preuves notamment avec le DUERP. 

Lorsqu’un de vos salariés (même un intérimaire) se blesse, informez rapidement votre assureur. Il vous indiquera la marche à suivre si vous recevez une mise en cause pour faute inexcusable de la part de la caisse primaire d’assurance maladie, des victimes ou de toute autre organisation.

Il saura notamment vous conseiller quant au déroulement des opérations (enquête, justice),vous indiquer la conduite à tenir et les mesures à prendre (constat d'huissier, expertise…) et vous préciser les conséquences d’éventuelles poursuites.

Cas concret : un accident entraîne des frais importants pour l’employeur

C’est ce qui est arrivé récemment à une entreprise, dont l’un des salariés a fait une chute mortelle en voulant dégivrer un appareil situé sur un pylône. Son épouse, désormais veuve, invoque alors la faute inexcusable devant le Tribunal des Affaires de la Sécurité sociale pour obtenir une indemnisation.

Le tribunal correctionnel a reconnu l’employeur pénalement responsable pour insuffisance d’évaluation des risques, absence de formation et mise à disposition de matériel de protection obsolète. À ce titre il a été condamné à 15 000 € d’amende.

Un premier jugement du tribunal correctionnel a abouti à la condamnation de la société au pénal à 30 000 € d’amende pour insuffisance d’évaluation des risques, absence de formation et mise à disposition de matériel de protection obsolète. Il a échappé à une peine de prison avec sursis.

La constitution de partie civile de la veuve de l’employé et ses deux filles a, par ailleurs, été déclarée recevable devant le tribunal correctionnel. Cela signifie qu’elles peuvent demander une majoration de la rente ainsi qu’une réparation du préjudice moral devant le Tribunal des Affaires de la Sécurité sociale.

Le Code de la Sécurité sociale prévoit que des indemnisations peuvent être versées en dédommagement des préjudices suivants :

  • Les préjudices pour souffrances physiques et morales ;
  • Les préjudices esthétiques et d’agrément ;
  • La perte ou la diminution de promotion professionnelle.

Depuis une décision du Conseil Constitutionnel du 18 juin 2010, le périmètre d’indemnisation a été élargi et comprend désormais :

  • Les frais d’adaptation du logement et du véhicule en cas de handicap ; 
  • Le « déficit fonctionnel temporaire » c’est-à-dire les périodes d'hospitalisation de la victime, mais aussi sa « perte de qualité de vie » pendant toute la durée du traitement médical ;
  • L’aide au quotidien fournie par un tiers pendant la durée du traitement médical des conséquences de l’accident.

Dans le cas de figure évoqué, la majoration de rente a été évaluée à plus de 211 416 €, avec attribution de 90 000 € de préjudice moral répartis entre la veuve du salarié décédé et ses enfants (30 000 € pour la veuve et 30 000 € par enfant).

La garantie faute inexcusable peut prendre en charge ces montants ainsi que les frais de défense pénale, les frais d’avocat si vous en avez un (jusqu’à un certain montant). Seule l’amende de 15 000 € n’est pas prise en charge. 

À noter : le déficit fonctionnel permanent, c’est-à-dire les souffrances qui suivent l’accident du travail, n’est plus réparé par la rente d’après l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale. 

LES CHUTES DE HAUTEUR : UN RISQUE MAJEUR POUR LE BTP

Veillez à être particulièrement vigilant en matière de prévention des risques de chute de hauteur : c’est une priorité pour toutes les entreprises, et une nécessité absolue dans le secteur du BTP.
Ce type d’accidents représente en effet :    

  • La deuxième cause de mortalité dans le BTP ;
  • 29 % d’incapacités permanentes ; 
  • 11 % des accidents du travail qui entraînent au moins 4 jours d’arrêt de travail ; 
  • Plus d’1,1 milliard d’euros de réparations des victimes(2)

(1) Décret n° 2001-1016 du 5 novembre 2001.
(2) Ameli.fr, https://www.ameli.fr/loire/entreprise/sante-travail/risques/chutes/risque-sous-estime#:~:text=Les%20chutes%20de%20hauteur%20et,origine%20de%2050%20%25%20des%20sinistres

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Assurance MMA BTP : couvrez votre responsabilité civile !

En cas d’accident de travail d’un de vos salariés, si vous ne lui avez pas remis d’équipements de sécurité ou si vous ne contrôlez pas qu’ils le portent, vous pourriez être mis en cause pour faute inexcusable de l’employeur. L’assurance de la faute inexcusable de l’employeur est proposée dans votre contrat d'assurance multirisque professionnelle MMA BTP(1). Parlez-en à votre Agent Général MMA.

(1) Nos prises en charge sont faites en application des garanties/options souscrites ainsi que des conditions, limites, exclusions de garanties fixées aux conditions générales (CG n°343) et aux conditions particulières du contrat MMA BTP disponibles sur mma.fr ou en agence.

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